lundi 31 décembre 2007

vendredi 21 décembre 2007

à lire

Article d'Huguette Charrier consacré au livre d'Agnès Gueuret Sur les sentiers de Qohéleth dans la revue trimestrielle PARVIS n° 36 de décembre 2007.

nouveau site internet

Le nouveau site des éditions du corridor bleu est en ligne.
Merci à Antoine Lamaze.

jeudi 20 décembre 2007

épopée 26

26.
le spécialiste des sangsues
touille la vase
« c'est mon âme »
leur corps élastique
prévisible
le scalpel ouvre leur ventre noir
petites machines
qu'il chérit
les publicités en apparence abrutie
sont destinées aux small brain
mes chéries
jamais vous ne vous brisez
lorsqu'on vous torture
endurez
les instruments sont si beaux
aluminium, circuits imprimés, puces
vos corps sont des tabernacles
que j'ouvre et ferme
à ma guise
mes sangsues, mes putes, mes camarades
mes machines
mon âme

mardi 18 décembre 2007

vendredi 14 décembre 2007

à lire

Le site plexus-s animé par Matthieu Brosseau publie en feuilleton mon Épopée.

jeudi 13 décembre 2007

épopée 24, 25

24.
qu'il s'avance
qu'elle s'avance
pas au détour, ni au bout

25.
l'espoir et la crainte
tissent
la course des barbares
on se marre dans le fossé
en fumant du gros
la course des barbares
parfois dévaste notre système respiratoire
crache, crache! frérot, camarade!
il est doux
s'entassent ils au fond du monde
être invisible n'a plus de sens
et doit en avoir un
crache, crache! frérot, camarade!
on s'en fout le cœur serré
la gorge qui grince
les handicapés dansent sous le ciel malade
pour louer les dieux trop présents
des filles ouvrent leurs cuisses huileuses
d'où sortent des boulons, des chevilles
des armes rouillées qu'ils brandissent
hilares
les mères mangeront leurs enfants, à coup sûr!
l'oreille collée contre la piste
j'entends à peine le galop destructeur
s'évanouir de l'autre côté

mercredi 12 décembre 2007

à lire

La revue Passages nous offre son septième numéro. Toujours dirigée par Christian Edziré Déquesnes, on peut y lire & voir des textes et/ou collages de Cécile Richard, Claire Ceira, D. Gest, Carole Darricarrère, Isabelle Vaha, Lucille Calmel, Tristan Félix, Pascal Ulrich, Vincent Courtois, Vincent Farasse, Pascal Lenoir, Ch. Edziré Déquesnes, Antoine Dufeu, Gottfried Gröll, Pierre Malbutine, Rémi Froger, C-M. Briseul, Christophe Manon, Jean-Marc Thévenin, Antoine Boute, Bernard Barbet, Jean-Luc Demunck, L'âne qui butine et S.O.D.A. 07.

Supplément: Lamentations de Ch. Edziré Déquesnes & Ivar Ch'Vavar (édition bilingue français-picard, préface de Catherine Savage Brosman).

On ne dira jamais assez à quel point il est important de lire et soutenir cette revue (comme beaucoup d'autres).

Abonnement pour 1 an (6 n°): 25 €
Chèque à l'ordre de Christian Déquesnes 15, rue du Général Delestraint
59230 Saint-Amand-les-Eaux

bullitlala@neuf.fr

mardi 11 décembre 2007

épopée 22, 23

22.
le gosier sec
gaspiller toute mon eau qui n'étanchera rien
j'entre dans le désert
partout, rempli de miroirs, je suis
le lion parle
je le fuis parce que lion
l'agneau parle
je le fuis
mon ombre je la suis de par les dunes
des attributs changent au fil des nuits
une gigantesque forme blanche
projetée par des machines dérivées de la matière cérébrale
d'où je parle?
parler n'importe
plus

23.
détruis-moi
…(et)…
le bras n'est plus horizontal
pointe l'arme
je ne gravis pas
seulement quand je hais
les langues de sang
brodent

vendredi 7 décembre 2007

épopée 20, 21

20.
vois dans le sang les vestiges
de tes sentiments
les attentions, oui, et de restes de vie
instants qui vibrent le long de la gravité
celle qu'on donne gratuitement
mais qui pourrait ne pas être
une odeur, le toucher d'une peau satinée
des histoires
humer âcre le cadavre qui n'est ni de la viande pour vers
ni un collier vivant d'états d'âme
rentrez chez vous
partez tous
vos petits ont besoin de vous
la terre boit comme une
les dernières gouttes de sang
les derniers barbares
les derniers incidents

21.
« tout est buée »
cela est acceptable sauf pour moi
et le fait de ne pas l'accepter ne peut que renforcer sa vérité
j'écarte les branches avec fermeté et réalisme
certaines heures sont perdues ou inutiles
mais l'ensemble est important
c'est le mont des oliviers!
ma nuit noire pendu au doute oui moi!
le reflet tremble diaphane etc.
dure moins qu'un instant
jacky ramasse les carottes

jeudi 6 décembre 2007

épopée 19

19.
la lutte carnassière
visages défaits, haine haletante
ruses de l'espèce, si belle dans un parfum léger
les femmes cherchent un bon reproducteur
savourer la ruine, après, après! c'est après qu'il faut courir
larges dans nos poitrines qui cognent
la nature rude, froide qui fait fumer nos poumons
ligotés à une chaise, que leur faire? clairement hostiles
l'attente, le regard, l'œil plus simplement, voilà le début de toute morale
oui, vaste, lancer, circulaire geste d'un, une faux, une hache, une pioche
s'abattre dans la motte rouge qui ne hurle plus
que faîtes-vous?
vos paroles ne sont plus entendues
il n'est plus possible de les entendre, tout est dernier
après
la réalité fait défaut
seul le réel vibre, le sang et son goût, le faire jaillir
sans que personne ne s'y abreuve
ne se fonde dans le grenat
je m'avance au-delà de la bordure extérieure
sur une route de chair
et sous mes pas tout s'évanouit

à écouter

L'émission "Un livre, un lecteur" réalisée par Guylène Dubois
sur Fréquence protestante recevra Agnès Gueuret,
auteur de Sur les sentiers de Qohéleth,
édité par le corridor bleu,
le 22 décembre 2007 à 14h (durée 30 min.).

dimanche 2 décembre 2007

Sur les sentiers de Qohéleth

Est-il possible aux êtres parlant que nous sommes d’entendre, dans le langage qui est le nôtre, une parole qui parle dans un autre langage, une parole qui serait celle de Dieu ? Et où peut-elle encore retentir cette parole, dans quelle bouche, par quelle oreille et dans quel livre ? C’est à partir de ces questions et de leur oubli – qui parle et dans quelle éternité concrète ? – que prennent appui les poèmes d’Agnès Gueuret. Le Pas du temps, publié en 2006 chez le même éditeur, proposait une lecture poétique de l’Evangile selon Luc. Sur les sentiers de Qohéleth déchiffrent, effacent et renouvellent l’Ecclésiaste (ou Qohéleth), dernier livre à avoir fait son entrée dans la Bible hébraïque. Nous savons, grâce à Charles Mopsik notamment, que la pensée rabbinique doit à ce texte sa vision critique du désir humain et son refus d’accorder une valeur absolue à notre monde. Une vie, en effet, doit s’éprouver dans une généalogie divine, indépendamment du temps mondain. Dévoilant poétiquement la pensée de l’Ecclésiaste, Agnès Gueuret sait que la loi de la nature, la loi en générale, ne repose sur rien si elle n’est pas suspendue à l’intériorité radicale et muette d’un être libre.

…tout n’est que vent / oubli, malheur / sous le soleil / brume évanouie / sur l’océan !

Il existe un autre temps que celui des générations qui se succèdent et des rythmes violents de l’histoire. La poésie, quand elle reprend en charge les enjeux de la théologie, sans soumettre pour autant son langage à je ne sais quelle orthodoxie religieuse, brise symboliquement la chaîne des époques. Et c’est maintenant – en cet instant – que la poésie décide. La décision, pour Kierkegaard, est comme une bête de proie qui bondit sur sa victime, elle est intense, soudaine et une, elle est le plus tendu des sauts, l’acte intime dans son déploiement pour Gueuret.
Ne me faut-il pas aller jusqu’à comprendre que le seul point de la terre et des cieux où je puisse appréhender le divin est en moi à l’intime, là où justement s’éprouve la durée ? L’impossible connaissance que j’ai de Dieu, que j’ai de moi, se résoudrait alors dans l’acte en lequel je me remets à l’inconnu qui me traverse et se signale en mon désir, telle une force qui me saisit, semblable à celle du bourgeon en train d’éclore et allant me pacifiant lorsque j’y consens.
S’appuyant sur les traductions et les travaux de Meschonnic (rappelons notamment que vanité, tout est vanité, se transforme chez Meschonnic par buée, tout est bué, tandis que Chouraqui propose fumée, tout est fumée), les trois palimpsestes qui composent ce recueil parviennent à mêler le sens à la matérialité sensible des mots. Fluidité, tension musicale, infinité de possibles, le rythme ici est ce qu’un corps peut pour le langage et il faut saluer Charles-Mézence Briseul, éditeur du corridor bleu, pour la haute tenue de son catalogue.

Pascal Boulanger

(article à paraître dans la revue EUROPE en mars 2008)